Synthèse dialogue apprenant "qu'est-ce que la facilitation ?"

Qu’est-ce que la facilitation ?

Le groupe sur les différenciations clés s’est intéressé à une différence importante : animateur vs facilitateur. Voici leur conclusion : l’animation c’est la locomotive, qui va amener de l’énergie extérieure au groupe. La facilitation est au service de l’énergie du groupe, pour que l’énergie vienne du groupe lui-même : elle donne le cadre qui permet de donner les prises de parole et l’intention, un cadre extérieur qui soutient le groupe dans l’exploration de ses couleurs et de sa propre énergie de vie.

Le facilitateur est au service du groupe, dans une écoute large, une posture basse, au service de, une écoute du centre qui amène de la fluidité, et d’animation finalement ! être à côté, aider à accoucher, tel le guide d’un aveugle, il est à côté, pas devant, pas derrière pour pousser, il soutient. Comme dans une danse, où à priori aucun des danseurs en couple ne marche sur les pieds de l’autre, le facilitateur « ne marche pas sur les pieds du groupe ».

Son rôle est d’accueillir l’énergie du groupe et de permettre le contenant.

Pour ce faire, répéter le cadre est important.

Pour un autre, qui avait l’habitude de facilement prendre la parole, voire la couper, la pratique de la facilitation, d’être facilitateur, lui a appris à dépasser ces travers et de prendre le temps de se poser, de respirer. Garder une attention sur son souffle, sur sa respiration lui permet de rester présent à ce qui se passe pour le groupe et d’éviter de réagir trop vite. Cela met en évidence la pertinence d’avoir une facilitation tournante dans les équipes afin que chacun puisse prendre conscience et développer les compétences du facilitateurice, en particulier dans la qualité d’écoute globale que cela nécessite, avec la capacité de dépasser son propre point de vue.

Ce rôle est inscrit dans une culture. Il faut un certain nombre de points communs au sein de l’équipe ou du groupe, une culture commune, pour pouvoir avoir un facilitateur. Quels accords sont nécessaires pour qu’il puisse faire son rôle ?

L’expérience d’un participant dans une réunion d’un café associatif : comment cela pourrait-il mieux se passer ?

La coordinatrice d’un café associatif a organisé une réunion et animé cette réunion : sa casquette de coordinatrice a pris le pas sur celle de facilitatrice de la réunion : elle induisait l’intention de la réunion sans soutenir le cadre : elle faisait l’inverse de ce qu’il faut faire. Résultat : le cadre n’était pas explicite, l’intention du coordinateur pour cette réunion omni-présente, l’implication collective finale mitigée.

Dans le cadre du cercle apprenant dont est issu ce document, nous nous sommes intéressés aux conditions qui auraient permis que la réunion se déroule différemment.

Qu’aurait pu apporter un facilitateur ? Quel périmètre pour chacun ? En revenant sur la différenciation clé entre animer et faciliter : ça peut être 2 rôles différents et le coordinateur peut jouer le rôle d’animateur. Ça nécessite un accord en amont avec le coordinateur : accepte-t-il ce rôle complémentaire de la coordination ? Sous quelles conditions ? Besoin de s’accorder comme les musiciens harmonisent leurs instruments avant de jouer ensemble. En généralisant cette problématique, cela soulève la question de la complémentarité entre manager/ coordinateurice et facilitateurice : entre le risque d’être au service du seul manager, cela peut venir contre carrer son rôle de service du groupe, de quelles permissions a besoin la facilitateurice pour jouer pleinement son rôle au service du groupe tout en respectant le rôle de manager ? Quelles sont les conditions à expliciter à un manager pour favoriser l’apport à la vie du groupe que permet la facilitation ?

Comment faire émerger ce nouveau rôle dans une organisation qui n’en a pas ? Préparer à l’avance et prévenir non seulement le manager ou coordinateurice, et également le groupe, l’équipe. Expliciter l’intention quand on propose cela de manière authentique : les accords de groupe, le rôle du facilitateur et l’intention derrière la facilitation.

La facilitation : entre besoin de sécurité et besoin d’appartenance

La facilitation répond à un besoin de sécurité individuelle au sein d’un groupe : comment puis-je être moi-même dans ce groupe sans crainte pour mon job, les critiques, les jugements ou les représailles ?

« En creusant, ce besoin de sécurité est le besoin apparent pour que je puisse appartenir à un groupe : j’ai un besoin d’appartenance encore plus fort, un manque douloureux en moi. Replonger dans des souvenirs de groupe, en enfance, où prenait la parole celui qui avait le bon mot, qui avait la bonne blague ou l’agilité d’esprit pour faire rire tout le monde, celui qui avait suffisamment confiance. Dans mes réactions durant ma jeunesse : j’avais beaucoup de ressentis, d’émotions intérieures que j’avais du mal à exprimer autrement que sur un mode réactif, qui m’excluait du groupe car je n’arrivais pas à exprimer cela, ça allait trop vite, la facilitation permet de donner le temps aux gens différents, à ce qui préoccupe chacun, et cela permet de pouvoir appartenir au groupe. »

C’est au coeur du pour quoi de la facilitation : permettre aux personnes réactives, mal à l’aise, rentre dedans, de contribuer positivement. permettre aux personnes timides, qui ont besoin de temps, de contribuer tout simplement.

Avec une facilitation, nous pouvons reprendre chacun un rôle actif dans l’appartenance à un groupe, on touche au coeur du pour quoi de la facilitation.

La facilitation comme transformation paradigmatique individuelle et collective

« Je sais ce qu’il ne faut pas faire et j’ai du mal à me laisser transformer, parfois je me fais reprendre par mes vieilles habitudes réactives… » La facilitation est un moyen de transformation, individuel et collectif, afin de mieux écouter, de s’enrichir les uns les autres de nos différences et de nos divergences qui peuvent alors mieux s’exprimer. Je reconnais en moi ce besoin de cadre : ça libère l’esprit que quelqu’un s’en charge et je peux porter mon attention sur autre chose.

La facilitation et la profondeur : l’auto-facilitation comme moyen d’amener de la profondeur dans les échanges ?

Dans un dialogue profond, aux accords collectifs de tout cadre de sécurité s’ajoutent les conditions intérieures auxquelles chacun consent au préalable. Ces doubles accords intérieur / extérieur permet bien souvent au cercle de « s’auto-faciliter » et le facilitateur est un participant comme un autre. Il peut arriver parfois de devoir reprendre la posture de facilitateur mais cela est très rare. Au-delà de la simple disparition du rôle du facilitateur durant le dialogue, peut-on parler alors d’auto-facilitation collective ? Ou est-ce simplement qu’un groupe n’a besoin d’un facilitateur que très rarement si les individus qui le composent sont suffisamment matures en terme de coopération, capables de respecter de manière suffisante les accords intérieurs ?

Cela pose un besoin de clarté : en amont, ça soutient si la facilitation exprime clairement si elle est partie prenante ou pas, quand on entend le facilitateur dire qu’il prend sa place de participant, ça clarifie, ça questionne et ça apporte de la matière à réflexion. Si ce n’est pas explicite, la perte de confiance de voir un facilitateur se servir de son rôle pour avancer des idées qu’il a en tant que participant ou coordinateur est délétère pour la confiance et la dynamique de groupe.

Des conditions intérieures sont elles une manière de s’auto-faciliter individuellement afin que collectivement nous puissions aller plus loin ?

Peut on alors parler de facilitation profonde ?

Le cadre et la forme sont à expliciter, définir, comme dans tout processus d’intelligence collective. Avec le dialogue profond, on rentre dans un processus intérieur, on touche à quelque chose d’un peu plus profond. Quelles seraient les compétences et conditions de cette facilitation profonde ?

Si ce sujet vous intéresse, vous pouvez contribuer :

  • en asynchrone : commenter, proposer des ressources complémentaires ou tout à fait contraires dont les participants du dialogue pourront s’inspirer.

  • en synchrone : Venez poursuivre ce premier dialogue apprenant au cours de notre prochaine réunion jeudi 24 novembre de 9h à 11h30.

Merci pour le partage, c’est très intéressant !

Donc si je suis cette logique, fait un energyzer relève de la posture de l’animateur.rice plutôt que du facilitateur.rice ! :smiley:

@YohanReversat je ne comprends pas ce que tu veux dire ? Merci de m’éclairer.

effectivement @YohanReversat c’est comme cela que je le comprends d’après ce qu’on s’est dit. Si on veut rentrer un peu plus dans la finesse, je dirai que le facilitateur ou le concepteur de l’évènement a choisi le brise glace en fonction de l’intention globale, de la maturité coopérative, des croyances et vision du monde des participants…et l’animateur l’anime… comme cela peut être une seule et même personne in fine, ça a été relevé durant notre dialogue, que dans la facilitation il peut y avoir de l’animation, et réciproquement. ça résonne comment en toi ?

@RenaudAnzieu ça fait écho à la posture de facilitation vs animation. Une des formatrices de ma formation, disait ne pas vouloir utiliser d’energizer parce que selon elle ce n’est pas le rôle du facilitateur.ice à changer l’énergie de groupe. Son rôle c’est de prendre l’énergie du groupe tel quel est et de s’adapter à ça pour en faire quelque chose. (elle est en posture 100% facilitation) Est ce que c’est plus clair.

@YannLeBeguec Je suis assez d’accord avec ce que tu dis sur l’utilisation d’un brise glace. Mais dans mon commentaire je m’attarde sur vraiment un brise glace particulier qui est l’icebreaker. Après sur la suite de ton commentaire, c’est encore en reflexion chez moi si j’ai envie de prendre la posture d’animation lors d’un energizer et donc de proposer des energizer. Est ce que je ne pourrais pas imaginer une séquence sans nécessairement avoir besoin de mettre le groupe dans une certains dynamique. (ça me demande du lacher prise par ce que j’ai l”habitude d’energyzé après le repas) :smiley:

@YohanReversat très clair pour moi. Et j’aime cette distinction. Et du coup ca me fait dire qu’il serait possible d’imaginer de changer de rôle. Je prends le rôle facilitateur … puis je prends le rôle animateur où je propose un brise-glace, puis après je prends le rôle de facilitateur. Ca demande du doigté et aussi de la conscience de la part du groupe.
Et j’en profite pour partager un mot que j’ai appris il y a 2 jours, la stigmergie et que vous connaissez sans doute. Dans ce que j’en comprends, il n’y a plus de facilateurice, et il me semble que nous l’avons un peu vécu à certains moments hier à notre réunion de gouv :wink:

Moi je ferais la distinction ainsi (peut être l’avez vous déjà dit): l’animatrice anime un groupe, la faciltatrice facilite un processus

@RomainVignes nous ne l’avions pas exprimé en termes si(r) concis. merci de la synthèse que cela apporte.

En plus de ce qui a déjà apporté, je fais le distinguo entre le facilitateur qui “facilite un processus” du designer qui le conçoit en fonction de l’intention, du public, du temps dispo, …

et pour se souvenir, la facilitation graphique de Gaëlle de ce moment

comment le facilitateur/trice peut-il ou elle être à l’écoute profonde du groupe en aidant à l’émergence de ce qui se passe et donner en même temps son avis en tant que participant?

Avec le corps, par exemple en restant debout quand on facilite et assis quand on est dans le rôle….en+ on fait de la gym :smiley:

Quand je participe en plus de faciliter, j’aime énoncer aux participants que je fais bien la distinction entre mes prises de paroles et notamment en énonçant au préalable mon prénom à chaque fois que j’interviens en tant que participant. Après c’est sûr que cela dépend du contexte, et du recul que l’on a pour assumer les deux rôles en même temps. Ce n’est pas toujours une bonne idée de vouloir cumuler :smiley:

C est la question de la gestion et de la capacité de division de l attention propre à chacun et à chaque temps. Un choix conscient de focales. Ou non.

Je trouve votre synthèse de super qualité… ça me questionne même sur votre processus ? Comment avez-vous procéder pour arriver à cette synthèse ?

Dans les cercles de dialogue que je connais, il n’y a personne qui prend de notes pour que chacun puisse être pleinement présent et contributeur. C’est pour moi un moment d’émergence d’idées nouvelles vu qu’en s’appuyant sur le centre on ouvre les consciences. Mais là je vois un travail qui va jusqu’à une convergence, une synthèse qui statue presque sur les divergences qui ont pu s’exprimer… comme si vous arriviez à une seule voix. Ainsi ça éveille ma curiosité !

Il me semble, pour avoir assisté à la séance, que c’est surtout un travail de rédaction et de synthèse de Yann, que j’admire aussi, appuyé, entre autre, sur ce qu’il a entendu :wink:

pour être tout à fait honnête, j’ai pris des notes…donc oui je n’étais pas complétement présent au groupe. en même temps j’ai très peu retouché le déroulé de notre réflexion : durant la rédaction de cette synthèse, j’ai été bluffé de voir à quel point le flux de sens qui émergeait était cohérent. C’est justement cela que permet le dialogue profond : explorer tous les points de vue, en étant ensemble tout au long du chemin. (et j’attire votre attention sur le verbe utilisé : il s’agit bien d’être ensemble, pour ensuite pouvoir faire ensemble peut-être).

Je lis et relis ce recueil de réflexions sur la différenciation clé entre animation et facilitation qui m’inspire et me mets en travail.

Il me semble que l’animation prend en charge la direction, la raison d’être et les moyens d’atteindre un but déterminé pour les bénéficiaires. C’est du directif descendant “bienveillant”, qui se passe de l’avis, de l’élan, de la créativité, de la singularité et de la richesse potentielle de contribution de chacun. Qui correspond à un mode de fonctionnement habituel, une culture commune qui a ses codes. Peut on imaginer un collectif qui déciderait que l’animation soit assurée à tour de rôle ? Il serait intéressant de le voir. J’ai du mal à en trouver exemple dans ma mémoire, tant ces rôles et places me semblent asymétriques et accompagnées de relations de pouvoir sur autrui, de domination. Pour qu’il y ait animation, il faut un choix de postures de direction d’un côté, et d’adhésion de fait, tacite, subie, explicite ou recherchée à suivre, à être animé.e.

La facilitation suggère une autre culture commune, également partagée, asymétrique ou non, potentiellement horizontale, à parité, rôles interchangeables. Le rôle de facilitation nécessite une culture en rupture avec celle d’animation, mais aussi une culture et un choix conscient et partagé pour le collectif en travail.

Ce sont à mon sens deux postures philosophiquement différentes.

Comment faciliter l’accès et l’expérimentation de (à) cette autre culture ? Par quels petits pas ?